E MONDE | | Par Patricia Jolly (Amsterdam (Pays-Bas), envoyée spéciale)
Les baleiniers japonais qui attendent l’été austral pour partir,
début décembre, pour trois mois de chasse au cétacé dans
les mers du Sud n’ont qu’à bien se tenir.
La Sea Shepherd Conservation Society (SSCS) s’apprête
à lancer à leurs trousses son nouveau vaisseau amiral, le
flambant neuf et ultra-rapide patrouilleur Ocean-
Warrior, avec l’ambition affichée de mettre un point final à
leur activité illégale.
« Ocean-Warrior est l’arme qui nous manquait depuis dix
ans, se réjouit Alex Cornelissen, 48 ans, capitaine et directeur
exécutif de Sea Shepherd Global, la branche internationale
de l’organisation de protection de la vie sous-marine basée à
Amsterdam. Nous disposons désormais d’un navire plus
rapide que n’importe quel bateau de braconnage en haute
mer.
Nous pourrons les suivre partout, voire
leur fausser compagnie s’ils deviennent trop agressifs. »
Des femelles enceintes capturées
Fondée en 1977 par le Canadien Paul Watson, Sea Shepherd
s’est fait une spécialité de lutter contre toutes les formes de
pêche illégale.
Depuis plus de dix ans, l’ONG tente – entre autres –
de barrer la route aux pêcheurs japonais qui, sous couvert de
recherches scientifiques et malgré un moratoire mondial
datant de 1986, traquent les cétacés jusque dans leur
sanctuaire de l’océan austral et en commercialisent la viande.
L’organisation environnementale a cru la parade trouvée
lorsqu’en mars 2014
la Cour internationale
de justice (CIJ) de
La Haye, organe
judiciaire des Nations unies, a jugé que
l’étude de l’évolution des baleines dont arguait
le Japon était détournée à des fins commerciales.
Tokyo a alors accepté de cesser ses « recherches » létales
pour la saison 2014-2015, mais l’Institut de recherche
japonais sur les cétacés est revenu à la charge dès
novembre 2015, proposant à la Commission baleinière
internationale (CBI) deréduire à 333 baleines de Minke –
contre 1 050 auparavant – son objectif annuel de pêche po
ur douze ans. Les harpons sont ainsi ressortis le
1er décembre 2015. « Sur ce quota, la moitié des baleines
capturées étaient des femelles enceintes », affirme
Lire aussi : Les navires baleiniers japonais ont tué 333
Avec son pavillon à tête de mort, trident et houlette de berger
hissé haut, c’est le premier bateau jamais construit par Sea
Shepherd qui dispose d’une flotte totale de huit unités. Long
de 54 m, ce bâtiment en aluminium à l’étrave effilée évoque
les navires de guerre. Il a été construit sur le modèle des
ravitailleurs de plates-formes pétrolières pour 8,3 millions
d’euros, grâce à un financement de loterie nationale
néerlandaise qui reverse une partie de ses recettes à des
associations de protection de l’environnement.
Guerrier des océans
Son poste de pilotage futuriste entièrement cerné de pare-
brise permet d’exercer une surveillance à 360 degrés tout en
restant à l’abri. Il dispose d’un puissant canon à eau rouge
pour aveugler les braconniers et décourager toute velléité
d’abordage, et d’une plate-forme d’hélicoptère. Mais le
« guerrier des océans » est surtout un bolide. Selon les
conditions météorologiques, il peut atteindre de 27 à 30
nœuds (de 50 à 55 km/h). Ses quatre moteurs doublés d’un
système de propulsion hybride lui permettent
une consommationde carburant plus modeste et une
réduction des émissions de CO2. Autant d’innovations qui
permettront à l’équipage de ne pas couper le chauffage lors
de ses glaciales missions.
« C’est le jeu du chat et de la souris, explique
M. Cornelissen. Pour empêcher le treuillage du cétacé
capturé depuis le bateau harponneur vers le navire usine
équipé pour le dépecer et le mettre en boîtes, nous devons
nous placer derrière ce dernier, mais, jusqu’ici, les
harponneurs qui marchent à 20 nœuds [37 km/h] nous repéraient souvent avant qu’on ne trouve leurs navires-usines, beaucoup plus lents. »
Cette bataille a été jalonnée d’affrontements parfois violents. Comme en janvier 2010, quand l’Ady Gil, un trimaran de
24 m de Sea Shepherd, a sombré quelques heures après une
collision avec un baleinier nippon, les torts
semblant être partagés par les capitaines des deux
navires… « On nous traite parfois de terroristes, mais les
terroristes sont ceux qui détruisent la nature, se défend le
capitaine Cornelissen, qui estime que l’ONG a sauvé
5 000 baleines en dix ans. Et nous nous chargeons de
afin de préserver leurs relations économiques et
commerciales avec le Japon. »
Ocean-Warrior a levé l’ancre, lundi 3 octobre, après une
semaine d’escale à Amsterdam occupée à des visites guidées
destinées au public et aux médias.
Il fait route directe vers Melbourne (Australie), qu’il devrait
atteindre en cinq semaines afin de procéder aux derniers
réglages nécessaires à cette onzième campagne de protection
des baleines. L’opération a été baptisée « Némésis », du nom
de la déesse grecque de la colère et du retour à l’équilibre.
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/planete/article/2016/10/03/ocean-warrior-nouvelle-arme-contre-les-chasseurs-de-baleines_5007209_3244.html#Iw3z2IwpRWuQcpxG.99
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Les baleiniers japonais violent le verdict de la Cour internationale de Justice
Archive : 3 petits rorquals sur le pont du Nisshin Maru en 2014 - Photo: Tim WattersDans l’immensité de l’océan Austral, la flotte baleinière japonaise a probablement déjà atteint illégalement son quota réduit de 333 petits rorquals.
En raison de l’élargissement de la zone opérationnelle et le fait qu’ils ciblaient un tiers seulement de leur quota, les baleiniers japonais ont pu impunément violer le verdict de la Cour internationale de Justice (CIJ) stipulant l’arrêt des activités de la chasse à la baleine japonaise dans l’océan Austral.
Sea Shepherd Global espérait que les nations membres de l’ONU, et en particulier la Nouvelle−Zélande et l’Australie, soutiendraient le verdict de la CIJ.
Elles ne l’ont pas fait.
À défaut, Sea Shepherd Global s’attendait à ce que les gouvernements de la Nouvelle−Zélande ou de l’Australie lui fournissent au moins les coordonnées de la flotte japonaise lui permettant de recueillir des preuves sur la poursuite des activités illégales de cette dernière.
Ils ne l’ont pas fait.
Afin de mettre un terme aux activités illégales des baleiniers japonais, il était d’autant plus impératif que ces preuves soient recueillies cette année.
Si Sea Shepherd Australie a demandé aux gouvernements australien et néo-zélandais les coordonnées de la flotte japonaise, c’était pour lui permettre d’entreprendre le travail que la Nouvelle−Zélande et l’Australie refusent de faire.
"Il nous faut des preuves du mépris flagrant du Japon envers l’autorité de la Cour internationale de Justice," a déclaré le capitaine Alex Cornelissen, directeur général de Sea Shepherd Global.
"La collecte de ces preuves est absolument cruciale pour mettre fin à l’abattage illégal continu des baleines par les Japonais."
"Nous sommes très déçus par les gouvernements australien et néo−zélandais," a déclaré Jeff Hansen, directeur de Sea Shepherd Australie.
"Ils ont intenté un procès contre le Japon pour la chasse illégale à la baleine à laquelle il s’adonne.
Ils ont gagné l’affaire. Le Japon a passé outre à la décision rendue, et tout ce que l’Australie et la Nouvelle−Zélande se contentent de faire est de baisser les bras, permettant ainsi aux crimes des Japonais contre les baleines et l’humanité de se perpétuer. Ils font preuve d’un laxisme honteux."
Cette saison, le Steve Irwin, le vaisseau amiral de Sea Shepherd Global, poursuivra ses efforts pour lutter contre les activités illégales dans une mer où la criminalité règne sans opposition de la part des gouvernements et où le braconnage représente une activité rentable pour des entreprises criminelles qui se croient au-dessus des lois.
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